Entretien avec Brigitte Goutorbe, Présidente de la Chambre départementale des huissiers de justice du Val-de-Marne
Au tribunal, au sein des maisons de justice et du droit ou dans leurs cabinets, avocats et huissiers de justice du Val-de-Marne travaillent main dans la main. Des relations conviviales, mais aussi en pleine mutation à l’aube de la réforme de l’interprofessionnalité. Brigitte Goutorbe, présidente de la chambre départementale des huissiers de justice revient sur ces liens entre professionnels du droit, forcément amenés à se resserrer.
Où en est-on de l’interprofessionnalité entre avocats et huissiers de justice ?
Cela avance. Mais pas forcément entre avocats et huissiers de justice. En tant qu’officiers ministériels nous n’avons pas le même statut que les avocats. A ce titre, nous sommes plus proches des notaires. Avec les avocats donc, je pense que nous pouvons commencer par nous rassembler, et cela au sein de locaux qui seraient partagés. Cela serait judicieux, puisqu’avec les professions médicales cela marche bien.
Comment intervient l'avocat lors des procédures amiables de recouvrement de créances ?
C’est à lui que l’on s’adresse pour savoir s’il est d’accord sur la proposition du débiteur lorsqu’il fait le choix de nous adresser le dossier. Certains avocats arrivent cependant à trouver un terrain d’entente en dehors de la saisine de l’huissier de justice. Je crois que cela peut être une perte de temps. Une procédure devant huissier permet de partir en exécution tout de suite. L’huissier de justice reste le véritable personnage de l’exécution. Nous avons des moyens de recouvrement, la possibilité de nous déplacer sur le terrain et pouvons faires des saisies-attributions.
Est-ce une bonne idée de taxer les actes juridiques pour remplacer la taxe d’accès à la justice de 35 euros ?
Les huissiers de justice payent déjà beaucoup de taxes. Des taxes d’enregistrement, la TVA qui augmentera l’an prochain, l’affranchissement qui augmente régulièrement et la taxe transport. De plus, nous sommes très peu financés pour les actes pénaux d’audience, et nos missions d’aide juridictionnelle sont beaucoup moins bien évaluées que celles des avocats. Si le choix est fait de créer cette taxe, elle devra donc concerner toutes les professions juridiques.
Des travaux non conformes, des injures, des propos diffamatoires… la dernière campagne de publicité concernant la profession d’huissier incite à faire plus appel aux huissiers pour faire des constats. Est-ce là l’avenir de la profession ?
L’image des saisies et des expulsions reste en effet ancrée dans les esprits. Mais nous souhaitons montrer que les constats de l’huissier sont un excellent moyen de solidifier la preuve. Une fois le constat effectué, sa force probante lui permet en effet d’être utilisé dans le cadre de procédures judiciaires. A la demande des avocats, nous faisons d’ailleurs de plus en plus de constats de SMS ou de messages sur Internet dans le cadre de procédures de divorce.
Comment se passent les relations entre avocats et huissiers de justice dans le Val-de-Marne ?
Le bouche à oreille fonctionne très bien entre nos deux professions. Le Val-de-Marne est un petit département où nous nous rencontrons souvent. Nous travaillons dans un cadre convivial, d’autant plus que nous avons peu de communes difficiles dans le département. Nous sommes également très bien lotis au niveau des infrastructures, puisque nous avons deux maisons de justice qui fonctionnent très bien.
Que pensez-vous de la proposition d’interdire l’accès des avocats aux fonctions parlementaires ?
Ce qui me choque le plus, ce sont les parlementaires qui n’ont jamais porté la robe et qui deviennent avocat à l’issue de leur mandat. Heureusement, l’abrogation, le 17 avril dernier du décret passerelle par la ministre de la Justice y a mis fin. Mais si l’on cherche à pointer les possibles conflits d’intérêts que pourraient avoir les avocats d’affaires à exercer le pouvoir, on peut très bien rappeler que certains huissiers de justice siègent eux dans des instances municipales. Si l’on souhaite barrer la route de l’Assemblée nationale aux avocats, il faut aussi le faire pour les autres professions juridiques.