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Réforme de la Justice : les raisons de la colère

Les avocats vous parlent...
(Lire la tribune)

LA RÉFORME DE LA JUSTICE EST EN MARCHE !

Une marche forcée qui nuira aux droits de chacun et en laissera plus d’un sur le bord du chemin.

Les professionnels du service public de la justice sont mobilisés pour exprimer leur opposition profonde au projet de loi de programmation pour la justice 2018-2022.

La Justice va mal.

Par manque de moyens, notamment humains, elle ne peut plus faire face à sa mission de préservation des droits de chacun et de maintien de la paix sociale. Tantôt trop lente, tantôt trop expéditive, la Justice doit nécessairement être repensée.

Face à ce constat, deux visions s’opposent :

Faire plus et faire mieux, en augmentant significativement le personnel judiciaire pour lui permettre de répondre aux attentes légitimes du peuple français au nom duquel la Justice est rendue ;

Ou faire moins et moins bien, en réduisant le contentieux, en rognant sur les garanties des justiciables, en poursuivant une logique de réduction des coûts, antinomique avec le caractère intrinsèquement humain de ce service public particulier.

Sans surprise, notre gouvernement, poursuivant son travail de sape des services publics, a choisi la deuxième option, et c’est bien là l’objet de notre colère.

Loin de l’horizontalité promise et dans la droite ligne de toutes les réformes précédentes, celle annoncée pour la Justice est pilotée par des élites déconnectées de la réalité et dans une volonté évidente d’économie, sans aucun souci du justiciable et sans accorder le moindre intérêt aux demandes et propositions formulées par les avocats et juges présents sur le terrain au quotidien.

L’augmentation du budget dont se targue la Ministre de la justice est manifestement insuffisante, puisque les 1,72 % d’augmentation qui seront affectés aux services judiciaires couvriront à peine le coût de l’inflation.

Madame la Ministre de la justice affirme à l’envi que le projet qu’elle défend rapprochera le citoyen de son juge et améliorera la qualité des décisions de justice.

Nous affirmons que le contraire se produira et quiconque lit le projet de loi ne peut qu’en être convaincu.

Comment croire que la centralisation de certaines matières judiciaires garantira à chaque citoyen l’accès à une justice proche de chez lui ?

Comment l’intérêt général pourrait-il être sauvegardé quand une poignée de magistrats n’aura plus que 6 minutes pour examiner chacun des 600.000 dossiers d’injonction de payer qui sont soumis chaque année ?

En quoi imposer aux justiciables un préalable à la saisine du juge dans tous les litiges civils, préalable payant et dispensé par des organismes privés, les rapprochera-t-il de leur justice ?

Comment prétendre améliorer la qualité de la justice lorsque l’on revoit drastiquement à la baisse les droits de la défense ?

Imagine-t-on un seul instant, en proposant de réduire encore la collégialité, en première instance comme en appel, qu’un seul juge puisse faire mieux que trois juges réunis ?

Comment l’intérêt du justiciable, qu’il soit auteur ou victime, pourrait-il être sauvegardé quand le principe de l’oralité des débats sera supprimé pour bon nombre de crimes ?

Qu’adviendra-t-il des victimes, à l’heure où le dépôt de plainte s’avère déjà souvent difficile, lorsqu’on leur imposera de le faire en ligne, sans aucun accompagnement et sans aucune garantie quant au traitement de cette plainte ?

Et comment admettre que des décisions de qualité, humaines et équilibrées, puissent être rendues par le Juge si celui-ci n’a plus aucun contact avec les justifiables ?

La Justice ne doit pas seulement être dite, mais doit aussi donner le sentiment qu’elle a été bien rendue.

Ce sentiment ne peut pas naître chez celui qui n’aura jamais vu son juge, chez celui qui ne l’aura aperçu qu’au travers d’un écran, ou encore chez celui qui aura assisté à son propre procès derrière des vitres en verre.

La Justice est un pilier fondamental de notre État de droit et de notre démocratie, pas une chaîne de production qu’il s’agirait d’automatiser, pas une start-up à laquelle on pourrait appliquer le « business model » d’Amazon, pas un sommet qui ne serait accessible qu’aux premiers de cordée, ceux nés du bon côté, pas une soirée privée avec un contrôle à l’entrée.

Nous, avocats des licenciés et des PME, des expulsés et des bailleurs, des condamnés et des victimes, des mineurs en danger et des majeurs protégés, des surendettés, des exilés, des divorcés...,

Qui vivons au quotidien les dysfonctionnements du système judiciaire et son manque de moyens,

Qui luttons à chaque audience pour que les droits de nos clients soient respectés, que leurs explications soient entendues,

Qui portons leur parole malgré l’heure tardive et le peu de temps qui nous est imparti,

Qui connaissons leurs fragilités, leur découragement parfois, mais aussi leurs espoirs, leur volonté et leur soif de Justice,

Nous sommes révoltés par ce projet qui, sous couvert de modernité, éloigne un peu plus les justiciables de leurs juges,

Qui, au nom d’une prétendue efficacité, déshumanise la procédure judiciaire et heurte le serment que nous avons prêté.

Et, ce serment à l’esprit, nous nous élevons pour défendre vos droits à tous, justiciables anonymes, nulle part représentés et pourtant tous impactés.

Une centaine d’avocats du quotidien


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